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  • Edgar Degas vu par Paul Valéry

     

     Degas, Valéry

    Edgar Degas – Autoportrait, 1858, Sterling and Francine Clark Institute or Art, Williamstown

     

    « Un personnage singulier, grand et sévère artiste, essentiellement volontaire, d’intelligence rare, vive, fine, inquiète, qui cachait sous l'absolu des opinions et la rigueur des jugements, je ne sais quel doute de soi-même et quel désespoir de se satisfaire » - Paul Valéry

     

         Paul Valéry ne pense pas trop de bien des biographies. Le livre « Degas Danse DegasDessin » écrit par l’écrivain est un long monologue intellectuel sur un peintre qui était mort depuis une vingtaine d’années lorsque le livre est publié en 1938 chez Gallimard, après une édition précédente par Amboise Vollard. Pour donner de l’épaisseur à l’ouvrage, l’éditeur a rajouté de nombreuses photos d’archives, parfois prises par le photographe qu’était Edgar Degas. Des tableaux en noir et blanc sans grand intérêt ne sont là qu’à titre d’informations : peut-on apprécier les magnifiques pastels de Degas sans la couleur ?

     

     

     

         Edgar Degas a 60 ans, l’écrivain 23 ans, lorsque le jeune homme se présente au 37 rue Victor Massé à Paris, demeure du peintre, dans les années 1893 ou 94.

         Difficile de faire un résumé plus précis et plus juste du personnage Degas :

         « Tous les vendredis, Degas, étincelant, insupportable, anime le dîner chez Henri Rouart. Il répand l’esprit, la terreur, la gaieté. Il perce, mime, il prodigue les boutades, les apologues, les maximes, les blagues. Il abîme les gens de lettre, l’Institut, les faux ermites, les artistes qui arrivent ; cite Saint-Simon, Proudhon, Racine et les sentences bizarres de Monsieur Ingres… Son hôte, qui l’adorait, l’écoutait avec une indulgence admirative, cependant que d’autres convives, jeunes gens, vieux généraux, dames muettes, jouissaient diversement des exercices d’ironie, d’esthétique ou de violence du merveilleux faiseur de mots. »

     

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  • Degas à la Nouvelle-Orléans

     

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    Edgar Degas - Un bureau de coton à la Nouvelle-Orléans, 1873, musée des Beaux-Arts, Pau

     

     

        Savait-on qu’Edgar Degas (De Gas pour l’état civil) avait une branche familiale américaine par sa mère qui était créole ?

         Nous sommes en 1872, le peintre a 38 ans et est au tout début de sa longue carrière. Le charme et l’exotisme de la Louisiane, ancienne colonie française, le fascine. Il décide donc de rendre visite à son oncle et ses deux frères à la Nouvelle-Orléans. L’oncle a fait fortune dans le coton et les assurances. Les deux jeunes frères, Achille et René, travaillent dans l’entreprise familiale avec l’oncle.

         En octobre 1872, Edgar embarque, direction la Louisiane où sa famille américaine l’attend au grand complet. Il découvre la ville et les maisons luxueuses que plusieurs générations de créoles ont construites. La ville est en pleine reconstruction après les atrocités de la guerre de Sécession. La maison de son oncle a belle allure. Un atelier pour exercer son art lui est offert. Le frère, René, rapporte dans une lettre « Edgar est plein de curiosité pour la Nouvelle-Orléans et sa famille. Il semble enchanté de leur accent du Sud qu’il s’évertue d’apprendre ». L’artiste peint des portraits de famille, naturels et tendres. Il s’emporte : « Rien n’est plus difficile que les portraits de famille ! Faire asseoir une cousine pour vous alors qu’elle allaite un bébé criard de deux mois est très difficile. » 

         Début 1873, se languissant de la capitale parisienne, Degas prolonge son séjour de trois mois pour peindre le bureau de coton de son oncle où il va chaque jour. La toile se nomme « Un bureau de coton à la Nouvelle-Orléans » et montre son oncle et ses frères au travail : l’oncle assis au premier plan examinant un échantillon de coton ; Achille accoudé à la cloison vitrée, à gauche du tableau ; René, assis, lisant le journal. Au centre, un acheteur et un courtier négocient autour d’une table recouverte de coton. L’œuvre, accordant la primauté au dessin, est loin du mouvement impressionniste à venir deux ans plus tard et s’attache surtout à présenter la réussite des Degas dans le commerce et l’industrie textile.

     

     

     

         Dans les deux extraits de lettres ci-dessous, écrites à la Nouvelle-Orléans, l’on retrouve la verve savoureuse et l’humour étonnant du peintre que connaissent bien toutes ses relations.

     

    Lettre à Lorentz Frölich (peintre danois et ami de l’artiste) – Nouvelle-Orléans, le 27 novembre 1872

    […]

    L’océan ! Que c’est grand et que je suis loin de vous ! Le Scotia sur lequel je suis venu est un bateau anglais rapide et sûr. Il nous a menés (j’étais avec mon frère René) en dix jours, en 12 même, de Liverpool à New-York, l’Empire City. Triste traversée ! Je ne savais pas l’anglais, je ne le sais guère plus, et il y a sur la terre anglaise, même en mer, une froideur et une méfiance de convention que vous avez peut-être tâtées déjà.

    New-York, grande ville et grand port. […] Quatre jours de chemin de fer nous ont mis enfin ici. […]

    Que de choses nouvelles j’ai vues, que de projets cela m’a mis en tête mon cher Frölich ! L’art ne s’élargit pas, il se résume. Et, si vous aimez les comparaisons à tout prix, je vous dirai que pour produire de bons fruits, il faut se mettre en espalier. On reste là toute sa vie, les bras étendus, la bouche ouverte pour s’assimiler ce qui se passe, ce qui est autour de vous et en vivre.

    Avez-vous lu les Confessions de J.-Jacques Rousseau ? Sans doute oui. Vous rappelez-vous alors sa manière de décrire son vrai fond d’humeur, quand il est retiré dans l’île de St Pierre, en Suisse, et qu’il raconte que dès le jour il sortait, qu’il allait d’un côté ou de l’autre, sans savoir, qu’il examinait tout, qu’il entreprenait des travaux de dix ans et qu’il les laissait au bout de dix minutes sans regret ? Eh bien ! j’en suis là, parfaitement. Tout m’attire ici, je regarde tout, je vous décrirai même tout exactement à mon retour.

    Rien ne me plaît comme les négresses de toute nuance, tenant dans leurs bras des petits blancs, si blancs, sur des maisons blanches à colonnes de bois cannelées et en jardins d’orangers, et les dames en mousselines sur le devant de leurs petites maisons, et les streamboats à deux cheminées, hautes comme des cheminées d’usines, et les marchands de fruits à boutiques pleines et bondées, et le contraste des bureaux actifs et aménagés si positivement avec cette immense force animale noire, etc. etc. Et les jolies femmes de sang pur, et les jolies quarteronnes, et les négresses si bien plantées !

    Je viens de rater un grand pastel avec une certaine mortification. Je compte si j’en ai le temps rapporter quelque chose du crû, mais pour moi, pour ma chambre. On ne doit pas faire indifféremment de l’art de Paris et de la Louisiane, ça tournerait au Monde Illustré.

     

    Lettre à Henri Rouart (peintre, industriel, et grand ami de l’artiste) – Nouvelle-Orléans, le 5 décembre 1872

    […]

    René (le frère d’Edgar) est dans sa famille ici, il n’a que peu le mal du pays. Sa femme est aveugle mais elle est au-dessus de son malheur. On attend le troisième enfant dont je serai le parrain et qui n’aura pas ma turlutaine.

     

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    Edgar Degas - Madame René De Gas, 1873, National Gallery of Art, Wahington (Degas peint Estelle sa belle-sœur aveugle, une ample robe cachant sa grossesse, dans une belle harmonie de gris, blancs et roses)

     

    Les femmes ici sont presque toutes jolies, et beaucoup ont même dans leurs charmes cette pointe de laideur sans laquelle point de salut. Mais je crains que leur tête ne soit aussi faible que la mienne, ce qui ferait à deux une drôle de garantie pour une nouvelle maison. Je viens, hélas ! de lâcher quelque chose qui n’est rien et peut m’attirer une réputation atroce. Gardez-vous, Rouart, sur votre honneur, de ne jamais répéter de manière à ce que cela puisse être rapporté ici, à des personnes d’ici, ou à des personnes qui connaissent des personnes d’ici, que je vous ai dit que les femmes de la Nouvelle-Orléans paraissent faibles d’esprit ; ceci est sérieux – on ne badine pas ici. Ma mort ne laverait pas un tel affront et la Louisiane doit être respectée par tous ses enfants dont je suis à peu près un. – Si je vous disais après cela qu’elles doivent être bonnes, l’insulte serait entière et vous m’auriez, en répétant encore cela, livré définitivement à mes bourreaux.

    Je blague un peu, les femmes créoles ont quelque chose qui captive. […] Il y a de la tendresse à la 18e siècle dans leur air. De ces familles, beaucoup sont venues ici en culotte courte et ce parfum ne s’est pas encore en allé.

     

    Votre dévoué          DEGAS

     

     

     

         S’il fut court, ce séjour fut une étape décisive dans la formation artistique du peintre. À son retour, il décidera d'abandonner définitivement ses sujets historiques d'inspiration néoclassique à la mode dans les années 1860, préférant aborder la réalité quotidienne dans la lignée de ses toiles peintes à La Nouvelle-Orléans.

        En 1874, la première exposition des peintres impressionnistes va se dérouler dans les locaux du photographe Nadar à Paris. Il y participera avec ses amis avant-gardistes. Son exploration de certains thèmes nouveaux et moyens picturaux inédits commencera.

     

     

     

  • Degas, un peintre impressionniste ?

     

    Ma visite estivale au musée des impressionnismes à Giverny

     

     

     

         J’ai failli rater l’exposition de Giverny. Il restait trois jours avant la clôture le 19 juillet dernier…

         Installé au milieu d’un jardin découpé à l’ancienne en carrés fleuris éclatants de couleurs, ce Musée des Impressionnismes a un charme suranné. La petite route accédant au musée mène, si on la poursuit sur quelques centaines de mètres, vers la maison rose, les jardins et le bassin au nymphéas du peintre Claude Monet. L’artiste y habita durant 43 années.

         Le ciel normand, comme souvent, était d’un bleu délavé encombré de nuages moutonneux laissant échapper quelques maigres rayons de soleil.

         Dès l’entrée de l’exposition le visiteur sait de quoi il retourne. L’interrogation écrite en gros sur les murs : Degas, un peintre impressionniste ? était suffisamment explicite.

         Avant de venir,  j’avais bien ma petite idée en tête sur Edgar Degas. Je comptais sur la vision des œuvres exposées pour finir de me convaincre.

     

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     Edgar Degas – Portrait de l’artiste dit Degas au chapeau mou, 1858, Sterling an Francine Clarck Art Institute, Williamstown

     

     

     

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  • L'impressionnisme dans tous ses états

     

    Les impressionnistes en privé à Marmottan

     

     

      

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      Claude Monet - Impression, soleil levant, 1873, musée Marmottan, Paris

     

     

         Le musée Marmottan fête ses 80 ans cette année ! Si vous n’avez rien à faire de spécial, si vous aimez la peinture impressionniste et passez dans la région parisienne, ne foncez surtout pas aux Galeries Lafayette dépenser votre argent. Il y a mieux à faire…

         Courez à Marmottan voir la toute nouvelle exposition temporaire : « Les impressionnistes en privé ». J’en reviens… Un bonheur vous attend ! Celui de ressentir, en fin de journée, cette sensation d’éblouissement que vous réservera la visite de ce charmant ancien hôtel particulier proche du bois de Boulogne. 

     

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