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La face humaine de Vincent

 

     Comment un fou pourrait-il écrire les deux phrases ci-dessous ?

 

« Mon pinceau va entre mes doigts comme serait un archet sur le violon et absolument pour mon plaisir. »

 

« Hier j’étais au soleil couchant dans une bruyère pierreuse où croissent des chênes très petits et tordus, dans le fond une ruine sur la colline, et dans le vallon du blé. C’était romantique, on ne peut davantage, à la Monticelli, le soleil versait des rayons très jaunes sur les buissons et le terrain, absolument une pluie d’or.

Et toutes les lignes étaient belles, l’ensemble d’une noblesse charmante. On n’aurait pas du tout été surpris de voir surgir soudainement des cavaliers et des dames revenant d’une chasse au faucon, ou d’entendre la voix d’un vieux troubadour Provençal. Les terrains semblaient violets, les lointains bleus. J’en ai rapporté une étude d’ailleurs, mais qui reste bien en dessous de ce que j’avais voulu faire. »

 

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Vincent Van Gogh - Autoportrait, été 1887, Van Gogh Museum, Amsterdam

 

 

     Ni psychanalyste ni critique d’art, le professeur François-Bernard Michel dans son livre « La face humaine de Vincent Van Gogh » s’attaque à l’énigme Van Gogh. Pourquoi cet artiste universellement apprécié nous est le plus souvent présenté comme un être tourmenté, caractériel, malade, au bord de la folie. Pour cela le professeur va faire parler Vincent, utiliser sa correspondance pour réhabiliter l’image de l’artiste.

 

     J’ai beaucoup écrit sur Vincent Van Gogh. Ma passion pour ce peintre m’avait incité il y a deux ans à écrire un roman « Que les blés sont beaux » sur l’artiste. J’ai donc retrouvé avec plaisir dans l’excellent livre du professeur de nombreux extraits des courriers du peintre à son frère Théo, sa sœur Willemien ou à son ami le peintre Emile Bernard, sur lesquels j’avais travaillé. Le soir après sa journée de travail, il racontait son mal-être, sa mélancolie, ses doutes sur cette peinture que peu de personnes comprenaient.

     Personnellement, le livre ne m’a rien appris car la face humaine de Vincent Van Gogh je la connaissais si bien, depuis longtemps. Je savais qui était cet homme intelligent, sensible, cultivé, amoureux de la beauté.

 

     Au début de l’année 1888, l’auteur nous emmène en Provence sur les pas de l’artiste. C’est un long cheminement. Un parcours qui se terminera dramatiquement en région parisienne à Auvers-sur-Oise le 29 juillet 1890. Tout au long du livre la pensée de Vincent est finement décortiquée, analysée. Quelles sont les raisons qui ont pu mener cet homme si doué à une fin aussi tragique ? Pourquoi parlait-on de folie ?

 

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Vincent Van gogh - Le peintre sur le chemin de son travail, 1888, Tableau brûlé pendant la seconde guerre mondiale

 

     À Arles, Vincent est heureux de retrouver le soleil du Midi après les grisailles de Paris où il habitait depuis deux ans chez Théo. Sa vision picturale : réinventer l’art « Je veux créer un art qui sera celui de l’avenir » et fonder un atelier du Midi avec ses amis peintres.

     La venue de Gauguin à la fin de l’année 1888, leur dispute, et c’est le drame. À partir de ce moment, Vincent sera durablement perturbé. Il se tranche le lobe d’une oreille et les crises commencent, douloureuses. Les médecins à Arles sont inquiet : on parle de schizophrénie, épilepsie. Les Arlésiens ont peur de cet étranger. Il est devenu fou dangereux, disent-ils.

      À la demande de l’artiste, il est interné dans un asile à Saint-Rémy-de-Provence où les crises vont continuer. Il peint des toiles exceptionnelles de beauté.

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Vincent Van gogh - Paysage avec couple marchant et croissant de lune, 1890, Museum of Art, Sao Paulo, Brésil

 

    Cette période de souffrance met en lumière la pseudo-folie de l’artiste qui le poursuit depuis plusieurs années. Sur les conseils de son frère Théo qui l’a recommandé au docteur Gachet, Vincent part pour Auvers-sur-Oise. Dans cette charmante commune, durant tout le premier mois, il semble heureux. Gachet l’invite souvent chez lui et lui donne un remède d’une simplicité extrême : s’alimenter correctement, cesser de boire, beaucoup dormir, et, surtout, peindre, ce que Vincent s’empressera d’appliquer à la lettre. Il peint plus de 70 toiles en deux mois.

    Le spleen va finir par le rattraper : son frère a des problèmes financiers dont Vincent se sent responsable. À nouveau, il ressent une grande solitude artistique, sentimentale, et morale « Mon travail à moi, j’y risque ma vie et ma raison y a sombré à moitié ». Sa peinture n’intéresse personne. Invendable. Désespéré, il met fin à ses jours devant un champ de blé.

    

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Vincent Van gogh - Paysage avec château d'Auvers au coucher de soleil, 1890, Van Gogh Museum, Amsterdam

 

     

     Le professeur François-Bernard Michel tente d’expliquer les raisons de ce naufrage. Les médecins qui se sont occupés de lui depuis Arles étaient des médiocres. Le dernier, à Auvers, le docteur Gachet, passionné de peinture, s’intéressera davantage au peintre qu’au malade et ne saura pas lui tendre la main : « Un médecin aussi malade et ahuri que moi ».

    Peintre de génie et écrivain de talent, Vincent était un hypersensible : « Les émotions qui me prennent devant la nature vont chez moi jusqu’à l’évanouissement ». Antonin Artaud considérait que Van Gogh était « Un homme que la société n’a pas voulu entendre. » Cet artiste qui fut souvent rejeté : Gauguin, les habitants d’Arles, Gachet, voulait tant être aimé « Nous avons besoin de gaîté et de bonheur, d’espérance et d’amour. Plus je me fais laid, vieux, méchant, malade, pauvre, plus je veux me venger en faisant de la couleur brillante, bien arrangée, resplendissante. »

 

peinture,van gogh     La peinture de Vincent à Auvers exprime sa mélancolie profonde : « J’ai fait le portrait du docteur Gachet avec une expression de mélancolie ». « La mélancolie me prend fort souvent avec une grande force, (…) et faire de la peinture qui nous coûte tant et ne rapporte rien, même pas le prix de revient, me semble comme une folie, une chose tout à fait contre la raison. Alors je me sens tout triste. »

 

 

 

 

Vincent Van gogh - Portrait du docteur Gachet, 1890, collection particulière

 

    L’un de ses derniers paysages « Champ de blé aux corbeaux » a un aspect hallucinant.

 

     Le professeur révèle la véritable image de Vincent, diagnostique sa maladie : la mélancolie. Vincent Van Gogh nous apparaît tel qu’il était : généreux, sensible, vivant pour son art.

« Je peux bien dans la vie et dans la peinture aussi me passer de bon Dieu, mais je ne puis pas, moi souffrant, me passer de quelque chose plus grand que moi, qui est ma vie, la puissance de créer. »

 

  

Commentaires

  • Merci Alain de remettre Van Gogh à l'honneur en période de confinement!!! On dirait en 2020 qu'il était bi-polaire et l'alcool n'arrange pas l'esprit mélancolique!! Il écrivait très bien mais son écriture est moins torturée que sa peinture après Gauguin!!Quand à sa fin!!! tu avais réalisé des posts comme quoi, il y avait un doute sur son suicide qui n'en fut pas un!! Ah, Van Gogh restera toujours un mystère!!!Bisous Fan

  • Je sais j'ai déjà beaucoup parlé de Van Gogh mais des amis me donnent sans cesse de nouveaux bouquins sur l'artiste. Chacun à son opinion. La mienne est faite depuis longtemps. Quand on écrit les phrases que j'ai mises au début de l'article, on ne peut être fou.
    Je ne vois pas de mystère Van Gogh. Il faut se replacer dans le contexte ; le mal-être, la mélancolie, les difficultés de peindre une peinture très avant-gardistes pour l'époque, incomprise, les médecins médiocres et limités, la dépendance financière envers son frère et sa famille expliquent beaucoup de choses.
    Difficile d'en finir avec Vincent. Je ne pensais pas parler autant de lui un jour.
    Belle journée Fan.

  • Hello ! I recently found your blog. I love the posts about Delacroix & Renoir :)

  • I don't know which posts you are speaking about ?
    You can write directly on the post about Delacroix and Renoir. That would be more clear for me.
    Thank you for coming.
    Have a good day.

  • Je n'ai jamais cru qu'il était fou... et je suis d'accord avec Fan pour le diagnostique de "bipolaire".
    En tout cas, merci pour la découverte de cette recherche médicale et de ses conclusions.
    Merci de nous parler de lui.
    Passe une douce journée.

  • J'ai déjà expliqué la personnalité et les raisons du suicide de Vincent dans mon livre. Vincent était un être complexe, inquiet, très sensible et mélancolique. Dépressif souvent mais il avait de nombreuses raisons à cela: sa peinture invendable, il ne supportait plus d'être à la charge de son frère qui venait de se marier et avait un bébé. ll y a plusieurs années, il avait écrit à Théo : « Sentir que je suis devenu un boulet pour toi et pour les autres, que je ne suis bon à rien, que je serai bientôt à tes yeux comme un intrus et un oisif, de sorte qu'il vaudrait mieux que je n'existe pas ? Si cela était, je préférerais ne pas trop m'attarder en ce monde. " Les médecins comme Gachet ne pensait qu'à récupérer ses toiles et seul son frère l'aidait, mais il était malade lui-même.
    C'est incroyable ce que l'on peut parler sur cet artiste exceptionnel. Je me demande ce qu'il en penserait.
    Merci de ton passage. J'ai lu tes belles chroniques d'internat.
    Belle journée à toi et bon anniversaire.

  • Bonjour Alain.
    Je ne comprends pas très bien cette présente intervention car si je te lis bien, tu n'as rien appris que tu ne saches déjà en parcourant le livre du Professeur F.-B. Michel. J'en déduis que nous, tes fidèles lecteurs, après avoir ici suivi toute l'élaboration préparatoire de ton propre roman, en l'ayant lu et en outre, pour ce qui me concerne à tout le moins, en m'étant documenté grâce à d'autres ouvrages à propos de Van Gogh, nous n'apprendrons rien non plus de cette ixième étude qui lui est consacrée.
    Pourquoi dès lors en fais-tu ici la "promotion" ?

  • L’on m’a offert ce livre, Richard. Je me devais donc de le lire pour connaître la pensée de l’auteur. Je l’avais déjà fait précédemment pour un autre livre « Le capital de Van Gogh » dont je n’ai pas parlé dans le blog. L’auteur cherchait essentiellement à vendre.
    Cette fois il s’agit d’un professeur éminent de médecine. Je n’ai rien appris puisque l’auteur s’est appuyé comme moi sur la correspondance du peintre. Néanmoins ce livre décrivant l’opinion d’un médecin qui conclue à la mélancolie, dont le mot revient souvent dans les écrits de Vincent, présente de l’intérêt, bien fait il peut intéresser d’autres personnes. Cela éclaire, peut-être de meilleure façon que je ne peux le faire moi-même, l’opinion que l’on peut avoir sur les troubles du peintre.
    Merci de ton passage.
    Bon confinement qui commence bientôt à s’atténuer.
    Belle fin de journée.

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